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Compte tenu de ses difficultés économiques et en vue de sauvegarder sa compétitivité sur le marché français des grandes et moyennes surfaces, la société par actions simplifiée (SAS) United Biscuits France (UBE), qui emploie 336 salariés sur deux sites (à Vertou, où est implantée l’usine de production, et Nanterre, siège des emplois de direction et des fonctions « support »), a décidé de réorganiser son activité.
Faute d’accord collectif au sein de l’entreprise sur le projet de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) prévoyant la suppression de 37 postes et 33 licenciements, le directeur régional adjoint des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l'emploi des Pays de la Loire, saisi d’une demande en ce sens, a par décision du 11 décembre 2020 homologué le « document élaboré par l’employeur » comme le prévoit l’article L. 1233-57-3 du code du travail.
Le comité social et économique (CSE) de la SAS United Biscuits France a demandé le 11 février 2021 au tribunal, qui dispose d’un délai de trois mois pour statuer, l'annulation de cette décision.
Par un jugement du 23 avril 2021, la 4ème chambre du tribunal a fait droit à cette demande, estimant que l’homologation contestée était illégale compte tenu de la méthode retenue par la société pour déterminer les catégories professionnelles, mentionnées au 4° de l’article L. 1233‑24‑2 du code du travail, fixées par le PSE, à l’intérieur desquelles s’appliquent les critères d’ordre des licenciements.
Les principes qui doivent guider le juge administratif dans un pareil litige sont clairement fixés par la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE 30 mai 2016 n° 387798 Comité central d’entreprise Fnac Codirep, au recueil ; CE 7 février 2018 n° 407718 société AEG Power Solutions, au recueil) :
Il appartient à l’administration du travail de s’assurer, au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d’information et de consultation ainsi que des justifications qu’il appartient à l’employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l’expérience professionnelle qui excèdent l’obligation d'adaptation qui incombe à l’employeur, l’ensemble des salariés qui exercent, au sein de l’entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l’administration refuse l’homologation demandée s’il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l’employeur en se fondant sur des considérations, telles que l’organisation de l’entreprise ou l’ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l’expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s’il apparaît qu’une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
En l’espèce, faute de réponse pertinente quant au caractère artificiel du découpage en 49 catégories (16 étant concernées par les licenciements), principalement fondé sur les intitulés des postes, pointé par le CSE tout au long de la procédure d’information et de consultation, et au constat de ce que le découpage des catégories professionnelles se rattachant à la direction commerciale –qui compte plus des deux tiers des salariés licenciés– est calqué sur l’organisation adoptée par la SAS UBE compte tenu de ses différents marchés et clients, le tribunal a estimé que l’employeur doit être regardé comme s’étant en partie fondé, pour définir les catégories professionnelles visées par les licenciements, sur des considérations qui, tenant seulement à l’organisation de l’entreprise, ne sont pas propres à regrouper les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune.