Par un jugement du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a précisé les motifs pouvant justifier un refus de visa d’entrée et de court séjour opposé aux membres de la famille d’un citoyen non français de l’Union européenne résidant en France, ressortissants d’un Etat tiers.
Par un jugement du 29 novembre 2021, la 10e chambre du tribunal, l’une des deux chambres exclusivement dédiées au contentieux des refus de visas, a apporté des précisions concernant les motifs pouvant justifier un refus de visa d’entrée et de court séjour opposé aux membres de la famille d’un citoyen non français de l’Union européenne résidant en France, ressortissants d’un Etat tiers.
Le régime législatif et réglementaire encadrant le droit d’entrée et de séjour des citoyens de l’Union ainsi que des membres de leur famille résulte de la transposition de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres.
L’article L. 232-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est relatif à leur droit au séjour en France pour une durée maximale de trois mois. Tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale, les citoyens de l’Union européenne et les membres de leur famille ont le droit de séjourner en France sans autre condition ou formalité que celles prévues pour l’entrée sur le territoire français.
L’article R. 221-1 du même code précise que les citoyens de l’Union européenne sont admis sur le territoire français dès lors qu’ils sont munis d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité. Et l’article suivant prévoit que les membres de leur famille, ressortissants d’un Etat tiers, sont également admis sur le territoire français à condition d’être munis, à défaut d’être titulaires d’une « carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union » en cours de validité, d’un passeport et, sauf dispense, d’un visa. Ce visa doit leur être délivré gratuitement et dans les meilleurs délais par l’autorité consulaire, dans le cadre d’une procédure accélérée, sur justification du lien familial.
L’article L. 233-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile organise quant à lui le droit au séjour en France, pour une durée supérieure à trois mois, des citoyens de l’Union européenne. Ce séjour est notamment soumis à la condition, selon leur situation, d’exercer une activité professionnelle en France ou de disposer pour eux et les membres de leur famille de ressources suffisantes pour ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale, ainsi que de justifier d’une assurance maladie (voir sur ce point, s’agissant de la famille d’un mineur citoyen de l’Union européenne : CE, 9 décembre 2014, Mme Pouabem, 386029, au recueil).
Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les membres de la famille d’un citoyen non français de l’Union européenne résidant en France, ressortissants d’un Etat tiers, ont droit, lorsqu’ils ne disposent pas déjà d’un titre de séjour « Carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union », à la délivrance d’un visa d’entrée et de court séjour aux seules conditions de disposer d’un passeport et de justifier de leur lien familial avec la personne qu’ils souhaitent accompagner ou rejoindre en France.
Pour l’application de ces dispositions, sont considérés comme membres de famille les personnes ayant la qualité de conjoint du citoyen de l’Union européenne, de descendant direct âgé de moins de vingt-et-un ans du citoyen de l’Union européenne ou de son conjoint, de descendant direct à charge du citoyen de l’Union européenne ou de son conjoint, ou d’ascendant direct à charge du citoyen de l’Union européenne ou de son conjoint.
Le tribunal a en conséquence jugé que l’autorité diplomatique ou consulaire n’est en droit de rejeter une demande de visa d’entrée et de court séjour dont elle est saisie par le membre de la famille d’un citoyen non français de l’Union européenne, ressortissant d’un Etat tiers, que pour un motif d’ordre public. Figure au nombre de ces motifs l’absence de caractère authentique des actes d’état civil produits par l’étranger pour justifier de son identité et de son lien familial avec le citoyen de l’Union européenne qu’il entend accompagner ou rejoindre, comme cela est déjà le cas notamment pour les personnes sollicitant un visa de long séjour dans le cadre d’une procédure de réunification familiale, ou dont la venue en France a été autorisée au titre du regroupement familial (CE, 30 juin 2006, M. Ouaziz, n°227844 ; CE, 12 octobre 2006, Mme Moutoulet épouse Lapostolet, n°297416).
En revanche, ni la circonstance que le citoyen de l’Union européenne que le ressortissant d’un Etat tiers entend accompagner ou rejoindre en France ne justifierait pas d’un droit au séjour au regard des dispositions de l’article L. 233-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ni celle que le ressortissant de l’Etat tiers serait susceptible de devenir une charge déraisonnable pour le système d’assurance sociale ne sont de nature à justifier le refus de délivrance du visa d’entrée et de court séjour en France.
Conformément aux dispositions de l’article R. 233-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les ressortissants d’Etat tiers membres de famille de citoyens de l’Union européenne doivent solliciter la délivrance d’un titre de séjour dans les trois mois suivant leur entrée en France, dès lors qu’ils sont âgés de plus de dix-huit ans (ou de seize ans s’ils entendent exercer une activité professionnelle). C’est seulement à l’occasion de l’examen de cette demande qu’il appartient à l’autorité administrative de vérifier si les critères tenant notamment à la vérification du droit au séjour du citoyen de l’Union européenne sont satisfaits.